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La lèche-mouton : mon souvenir de voyage préféré

Quand on revient d’un voyage aussi long, la question que les gens vous posent le plus, c’est : « c’est quoi ton plus beau souvenir ? ». Alors je vous le raconte tout de suite, mais laissez-moi d’abord digresser un tout petit peu.

« We follow a diet based on fat »

Leigh avait ses idées très strictes sur la nutrition pour être « healthy » comme elle disait : pas de farine blanche, beaucoup de gras et surtout « pas de sucre » parce que : « We follow a diet based on fat ». (NDLT : « Nous suivons un régime à base de gras »). (Yes, c’est le plus beau régime du monde).

Oui, Leigh était épaisse comme une allumette et oui aussi, si vous voulez en savoir plus, je vous expliquerais le régime à base de gras dans les commentaires.

Néanmoins, pour le moral de l’équipe de la ferme et pour soutenir la boulangère qui fait son pain en bas de la route, dans une yourte à 3 km de là, elle achetait tous les vendredi 2 kilos de cookies au chocolat. Ils étaient super délicieux, maxi sucrés et nous les mangions à la pause de 10h, trempés dans du lait tout juste traie ou dans du café bien brûlant.

Cookies au chocolat empilés

(Attention, fin de la digression !)

Où j’essaye de représenter mon pays à l’étranger (mais j’ai un fou rire)

Et c’est précisément ce que nous étions en train de faire ce matin-là quand soudain : grosse agitation. Leigh venait de décréter qu’il était temps de couper les ongles des moutons.

(J’ai appris depuis qu’en français, on dit « parer les onglons »)

Elle donne ses ordres et tout le monde s’exécute en courant dans tous les sens. Elle parle vite, n’articule pas trop, tout le monde est un peu agité et mon anglais n’est pas encore si bon que ça. Du coup, ça devient vite assez confus.

Je reste donc assise et j’attends. A la ferme, il faut parfois accepter de ne pas tout comprendre et laisser arriver les choses, alors je regarde le spectacle qui se déroule sous mes yeux en mangeant mon cookie, sachant bien que tout finira par s’éclairer en temps et en heure quand on aura besoin de moi. Pour le moment, je kiffe et je finis mon café.

J’attrape des mots au vol, par-ci par-là : « Blablabla terre de Sommières… » (en français dans le texte en plus !), « blablabla teabags » …

Au mot « teabags », Ricky (qui est en train de se bourrer de cookies à ma droite), manque de s’étouffer.

Il commence à rigoler comme un perdu. Pensant à une énième vidéo « drôle » sur son téléphone, je regarde du coin de l’œil. Pas de téléphone en vue. Il rigole à cause du mot « teabags ».

*tchikling kling !* (bruit de machine à sous) fait mon esprit : je comprends que l’expression « sachet de thé » désigne la même chose ici dans le Vermont qu’en France : des testicules. L’hilarité de Ricky est contagieuse, je commence à pouffer aussi. Mon rire redouble quand, tout grand gaillard Vermontais qu’il est, Ricky rougi jusqu’à la racine des cheveux en comprenant que je ri pour la même raison que lui.

« Bah ouais mon gars, je suis française et j’ai pétrolé moi aussi. Tu n’as pas l’apanage des sous-entendus sexuels » que je lui dirais si jamais je savais dire « apanage » en anglais.

Et « pétrolé » aussi.

Et « sous-entendu ».

Enfin bref, je lui dirais bien tout ça si je parlais mieux anglais.

Les autres personnes présentes dans la cuisine à ce moment-là nous regardent tous, l’air aussi interrogatif que surpris. Peut-être un peu désolés aussi. Personnellement, je préfèrerai me faire couper une main avec une cuillère à soupe rouillée plutôt que d’avoir à expliquer pourquoi je suis en train de pleurer de rire. Nous les français, on se traine déjà une réputation de gros crados malpolis partout à l’étranger, je n’ai pas envie d’ajouter « pervers » dans la liste. Je représente mon pays après tout. Humhum *petite toux de bibliothécaire*.

Du coup, je me concentre très fort pour retrouver mon sérieux et j’écoute les instructions de Leigh. Alors je ne comprends pas tout, mais dans les bribes de ce que je saisis (à ma grande joie) il y a : « courir après les moutons », « retourner les moutons », « tenir les moutons ».

Ça me va.

En ordre de bataille et bottes en caoutchouc : les moutons ont besoin d’une manipedi

Bambin de dos qui marche sous la pluie.

Moi quand je pars très décidée pour couper les ongles des moutons avec mes bottes en caoutchouc.

A 10h30, toute l’équipe se dirige en ordre de bataille et bottes de caoutchouc vers la grange. Installée dans une stalle contigüe à l’enclos, Leigh donne ses instructions (je vous mets la version sous-titrée, je suis sympa) : « Vous m’amenez Ivy en premier, ensuite les Texels, puis les Shetlands et enfin les bébés. ».

Pour Ivy, tout va très vite. La petite mémé reste très digne et nous méprise un peu, du haut de ses 14 printemps. Elle ne se donne même pas la peine d’agiter son arthrose et se laisse faire en attendant que ça passe. Pour les brebis suivantes en revanche, c’est pas la même limonade…

Ricky nous fait passer la première. Elle n’a pas du tout envie d’être là et commence à courir autour de la stalle. En essayant de la calmer, je l’attrape (mon entrainement quotidien de course à la brebis arthritique m’aide beaucoup).

« FLIP THE SHEEP MARIE ! » m’ordonne Leigh (NDLT : « Retourne le mouton Marie ! »)

Hein ? Euh… Bon, OK.

En gardant en tête les préceptes de la médecine du travail pour soulever des charges lourdes, je plie les genoux, bascule mon bassin pour préserver mes lombaires, enlace la brebis et…

« FLOP ! »

Le sheep est flippé.

(J’espère que vous appréciez cette allitération à sa juste valeur, car j’en suis très fière)

Selfie avec mouton

Le sheep est flippé et moi je fais un selfie pendant que Leigh lui manucure les sabots.

Je suis à présent à genoux, tenant dans mes bras une brebis sur le dos bien calée entre mes cuisses et je souri d’une oreille à l’autre tellement cette situation me rend heureuse.

Je n’en reviens pas.

Pendant ce temps, Leigh s’affaire sur les pieds de la bestiole et lui coupe l’excédent de corne qui pourrait lui blesser les coussinets. Oui, les brebis ont des coussinets. Oui, c’est trop mignon. Moi j’en profite pour lui faire un câlin. J’adore les moutons : ce sont sans doute mes animaux préférés avec les lamas.

Une fois la coupe terminée, on la relâche la grosse mémère et on attend la suivante.

Je baigne dans le bonheur.

Alors déjà, voilà plusieurs semaines que je suis dans une ferme dans le Vermont et que quotidiennement je course des moutons, je fabrique des fromages, du yaourt, je traie des vaches, que je danse la country etc… Mais EN PLUS, j’ai l’occasion de FAIRE DES CÂLINS aux moutons ? Non mais pincez-moi !

Je baigne (un peu trop) dans le bonheur et mon cerveau reptilien en profite pour faire n’importe quoi

La brebis suivante est très calme. Elle arrive toute seule dans la stalle et se laisse attraper. Je la retourne et l’installe bien confortablement sur mes jambes.

Selfie femme et brebis

Brebis qui chill et fermière euphorique (ça ferait un bon nom de groupe de rock).

Elle me regarde.

Je lui rends son œillade avec amour.

Elle m’envoie un petit coup de langue et me lèche la joue.

Je suis fondue de mignonnerie et, avant que mon cerveau conscient ne sache ce qu’il est en train de faire, mon cerveau reptilien active un réflexe : je lui lèche la joue à mon tour.

ARGH !

Réveil brutal, je reprends pied dans la réalité et je réalise ce que je viens de faire au moment où un goût de suint intense se diffuse sur mon palais. De suint et … Je ne préfère même pas imaginer le reste : ce mouton vit dehors, fait ses besoins dans son assiette et JE VIENS DE LÉCHER CE MOUTON ! AVEC MA BOUCHE !

Heureusement, personne n’a rien vu. Leigh est bien trop concentrée sur ses cisailles pour m’avoir remarquée alors je décide que rien ne s’est passé et je m’essuie la langue avec mon t-shirt en me promettant de me brosser les dents le plus vite possible.

Quelques minutes plus tard, pour reposer à la fois mes reins (c’est très lourd à retourner, une brebis, même quand on suit les recommandations du CHSCT) et ceux qui courent après les bêtes dehors, on échange. Je relaie Tonie et attrape les brebis une à une pour les envoyer à Leigh.

« Dedicated hu ? I like it ! »

Tout se passe bien. La dernière brebis cependant nous donne du fil à retordre. Évidemment, c’est sans doute pour ça qu’elle est la dernière. Quand on jouait à la balle au prisonnier à l’école, le-la dernier-e était le-la meilleur-e aussi.

Bref, Ricky et Ryan viennent m’aider.

Nous tentons de l’encercler mais elle feinte et s’échappe à l’autre bout de l’enclos.

Pas grave, nous recommençons. Elle fonce alors vers moi et me frôle. Je tente de l’attraper au passage et j’y parviens ! Mes doigts s’accrochent dans sa toison, je serre, je ne vais pas te lâcher ma cocotte.

Mais je suis en déséquilibre, et elle, c’est une boule de laine de 80 kilos en pleine course. Alors que je crois la partie terminée, je sens qu’elle m’entraine avec elle.

Me vient alors un réflexe idiot, mais humain (mais IDIOT) : au lieu de lâcher et de laisser filer, je me cramponne encore plus !

Me voilà donc à courir derrière une brebis lancée à pleine vitesse.

Je n’ai jamais été une sprinteuse.

Ni une fondeuse d’ailleurs.

En fait, je dois vous faire une confidence : je ne coure jamais, j’ai horreur de ça.

Alors après m’être accrochée pendant une dizaine de mètres, mes jambes ne suivent plus et je m’effondre dans l’enclos rendu très boueux par les neiges de ces derniers jours et les piétinements des moutons. J’ai de la gadoue partout sur le côté droit, des oreilles au mollet (et je dis « gadoue » pour être polie, car des moutons FONT CACA dans cette « gadoue »).

Morts de rire, Ricky et Ryan me tapent dans le dos alors que je me relève : « Dedicated hu ? I like it ».

(NDLT : « Très impliquée hein ? J’aime ça »)

Nous finissons par attraper la bestiole récalcitrante et la matinée se termine.

Je suis couverte de boue et de Dieu-seul-sait quoi d’autre, il faut que je me brosse les dents d’urgence et je vais probablement avoir la sciatique du siècle, mais ça en valait le coup : les moutons sont manucurés et ils ont eu leur dose d’amour.

Moi aussi.

Tout est bien qui finit bien dans le meilleur des mondes car aujourd’hui, j’ai embrassé un mouton.

Selfie femme et mouton

Allez, je vous embrasse vous aussi et n’oubliez pas de vous faire un masque à l’argile de temps en temps : c’est bon pour la peau !

A très vite

Marie B.

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4 Comments
  • Aurélie
    novembre 20, 2019

    Merci pour cet article, qui m’a bien fait rire ! Quelle expérience et quelle histoire ! Ils sont trop mignons ces petits moutons 🙂

    • mademoisellebambelle
      novembre 21, 2019

      Contente qu’il t’ait plu Aurélie ! Et oui, les moutons sont trop mims, on est d’ac là dessus haha !

  • Solenne
    novembre 26, 2019

    Bonjour Marie, je découvre votre blog aujourd’hui, et il file direct dans mon fil netvibes pour pouvoir lire chaque nouvel article!
    J’aime votre plume, votre ton et j’aime ce que j’y ai lu, quelques articles au hasard.
    Merci et belle journée.

    • mademoisellebambelle
      novembre 26, 2019

      Alors bienvenue Solenne ! Merci d’avoir pris le temps de me laisser un message, surtout aussi gentil que celui-ci :). Je suis ravie que les articles vous plaisent, bonne lecture alors !

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